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Mes Impressions du Lévitation France 2018

C’est le rendez-vous incontournable de la rentrée musicale angevine et cela fait maintenant 6 ans que Radical Production, le Chabada et The Reverberation Apreciation Society nous proposent ce rassemblement autour du rock et de la culture psychédélique. Pour la troisième année consécutive, le public était convié à vivre ces deux jours au Théâtre le Quai qui se métamorphose pour l’occasion.

                                                                       A lévitation on se lâche sur la grande bâche.

Le festival commence tôt et je n’arrive que pour le début d’Holy Wave où le quintet d’Austin déroule une pop onirique faite de guitares chatoyantes avec une basse monstrueuse. Je suis déjà impressionné par les visuels qui habillent comme à l’accoutumé la grande scène du Forum. On passe sans transition aux déchaînés de Prettiest Eyes, trio mexicain garage composé d’un batteur/chanteur beau gosse hurlant dans sa chemise repassée, un cow boy à la guitare et un synthétiseur distordu aux cheveux longs et à la mine éberluée. Ne leur laissez pas une pinata en caution avant l’anniversaire de vos enfants, je pense quelle volerait en éclats rapidement. Un peu violent pour l’heure. Je m’en vais faire un tour et découvrir le nouvel espace de merchandising, moins à l’étroit que dans le Bar du Quai. Le Patio trouve aussi un nouvel habillage plus important, plus visuel même si le béton ne reflète pas toutes les nuances du plasticien qui gère l’installation lumineuse pour les deux jours. Ravitaillement sur le parvis pour être prêt pour le trio The Soft Moon, très attendu des festivaliers.

                                     Austin brillamment représenté par Holy Wave au Levitation (ex Austin Psych Fest).

Le groupe transforme l’essai et sera la meilleure performance de la soirée, réveillant littéralement le festival. Ils se jouent des codes et des influences et passent à la moulinette new-wave, garage, EBM dans leur rock abrasif, hypnotique et tribal. Les premiers slameurs font leur trou et le pogo final témoigne de l’intensité de la prestation sur un public qui a plutôt tendance (à peu de temps de danse) à la position statique (statistiquement).

                             The Soft Moon en pleine rebelote de foutage de feu au Lévitation après le Chabada en 2014.

C’est le quintet The Blank Tapes qui reprend, et idem le saut rythmique me donne envie d’une balade plutôt que d’écouter les leurs; un bluegrass trop américano-américain mais qui évoluera vers un final plus rock ‘n’ roll plus dans le ton. S’ensuit la tête d’affiche avec les vétérans de The Brian Jonestown Massacre qui débarquent lentement sur scène. Le public est d’une ferveur religieuse. Le groupe déroulent ses mélodies face à un public statufié et pendu à la bouche d’Anton Newcombe, le leader du groupe; c’est le clou du spectacle du dodelinement psychédélique interne. Pour moi c’était un moment soporifique face à un groupe qui semble bien fatigué derrière leur grosses lunettes de soleil. Pour le final, on passe d’un tempo tambourin à un un temps plus bourrin avec les J.C Satan qui occupent les oreilles des spectateurs avec leur post-punk surpuissant mené ou malmené aux choix par une chanteuse qui hurle et scande dans une frénésie rythmique dans un T400 au volume bien élevé. « Bah en fait, vous n’aimez pas que le psyché, vous aimez le rock comme tout le monde » dixit le guitariste en direction des derniers spectateurs.

Samedi, l’association la Caverne Sensorielle faisait venir Dj Cam un des musiciens/dj les plus emblématiques de la scène abstract hip hop des 90’s dans le cadre des Austin Days. Le lien avec la culture psychédélique n’est pas vraiment évident mais reste que je ne l’avais jamais vu et que je n’ai pas été déçu des 3h de mix oscillant entre beat aux samples soul, classique hip hop US et deep house groovy pour conclure.

Je file rejoindre le Quai pour aller mirer Flamingods, un de mes coups de cœurs pop psyché aux inspirations world avec leur pléthore d’instruments. Les angevins avaient déjà pu voir leur inventivité sur la scène du Joker’s Pub l’année précédente mais cette fois-ci je rate la prestation des anglais qui à priori a mis tout le monde d’accord. C’est au trio Juniore d’entamer son concert pop rétro yéyé plus mélancolique qu’à l’époque des trente glorieuses. Rythmiques freakbeat, guitare surf, synthé ronronnant, un trio efficace même s’il peine à habiller la grande scène.

                    Juniore au top du spleen de Paris quelque part entre l’époque yéyé et une synth-pop plus contemporaine

Un autre trio lui fait place aussi composé de deux femmes et d’un vocaliste éructant sur des rythmiques binaires post punk. C’est Sextile, c’est plus violent, plus hypnotique, c’est un saut dans les époques, les tempos, l’engagement physique et les deux propositions. Place ensuite à la surprise du soir avec un groupe composé d’Alex Maas, le chanteur des Black Angels, du guitariste et du joueur de sitar d’Elephant Stones Rishi Dhir, placés sur le devant de la scène, d’un homme à tête de viking aux multiples percussions et de deux autres troubadours cosmiques pour un concert qui surprend et sidère le public. Sublime.

                                    S’il y avait un choix à faire, il serait Mien, tellement le groupe à fait planer l’assistance.

Je commence à être habitué au montagnes russes de la programmation et le duo Oktober Lieber ne déroge pas à la règle. Projet de Charlotte Boisselier et Marion Camy-Palou, les deux musiciennes parisiennes sont déchaînées sur leur machines dans une ambiance post techno/punk aux réminiscences electro-clash. Moins guilleret que l’oktoberfest mais tout aussi remuant. Retour au Forum où Flavien fera le bon berger prenant soin de ses ouilles. Ce sont les plus jeunes qui sont présents aux premiers rangs pour découvrir son nouveau live et découvrir l’album Contre-Temps qui sortira la semaine suivante. Le bonhomme moustachu est en solo entouré de ses machines et se lance dans un show lunaire, aérien, mélancolique… Il observe et se sert de l’énergie du public pour construire, improviser un peu et présenter sa prose qui oscille quelque part entre du Etienne Daho ou un Christophe aux mots bleus. Le public en sort enjoué, médusé, subjugué ou désabusé (c’est sur que ça manquait de guitares pour la rock credibility) mais qui un beau moment de suspension, l’OVNI de la pop française aura au tout cas fait mouche sur moi.

 

                      Flavien Berger et ses machines envoûtent le Forum

On reste dans les envolées électroniques mais vision plus apocalyptique dans la salle d’à côté avec le quatuor de Radar Men From The Moon où les quatre hollandais ont laissé guitare, basse, batterie pour s’aligner tel des Birdy Nam Nam d’un psychédélisme noir devant leur machines, synthés, pédales d’effets. Le public au summum du statisme se laisse infuser par leur set drone et hypnotique souvent proche des sonorités indus, cold wave et electro. S’en suit les très attendus Spiritualised qui viennent non pas défendre mais convertir la foule à leur slow rock acidulé de haute volée. Emmené par l’ex Spacemen 3, le leader Jason Pierce, les huit membres de la troupe nous proposent une fusion rock teinté de soul composés de ballades lancinantes et grisantes avec une dimension presque messianique, le public en redemande pour une apothéose extatique du festival. Une musique émouvante et harmonieuse tant étant sous l’influence un poil schizophrénique du musicien-guitariste. C’est un moment de recueillement, n’en déplaise aux plus énervés qui pourront lâcher un dernier pogo pour l’ultime Rendez-vous de cette 6 ème édition grâce au à la formation parisienne et leur belle prestation scénique et stroboscopique qui nous fait fatalement penser que la soirée fini trop tôt. 

                                           Le Patio où l’endroit idéal pour converser et rencontrer d’autres festivaliers.

Ce samedi bien plus enfiévré sauve un vendredi plus moribond en ambiance, nous ouvre la porte à plus de diversité même si comme d’habitude le psychédélisme et ses déclinaisons prennent un coup dans l’aile et que le rock gagne de l’altitude. Pour le reste, le cashless fait gagner un temps précieux entre ce va-et-vient permanent entre le Forum et le T400 qui auront plus que jamais été séparés pour une programmation plus apaisée dans le grand espace, relativement bien sonorisé encore cette année (un des challenge du festival), et la plus petite salle plus énervée au volume parfois indécent. Lévitation France est et restera un rendez-vous majeur pour les curieux et les rockeurs d’ici et d’ailleurs. Et une superbe expérience d’immersion sonore et lumineuse, qui ne cesse de prendre de l’ampleur, dans un théâtre le Quai métarmorfautosé.

E.Devèche

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